mardi 20 novembre 2007

oh douce civilisation...

Hier après-midi, alors que je me rendais tant bien que mal au milieu de manifestations de fonctionnaires en colère et de taxis échaudés à un entretien d'embauche plein de faux semblants telle une fraîche, ingénue et formatée ressortissante d'école de commerce, je me suis arrêtée déjeuner dans un restaurant plein de cadres supérieurs en mal d'amis et d'amour. L'un d'eux, assis derrière moi, a tenu par l'intermédiaire du serveur à m'offrir mon repas et m'a remis, accompagnée d'un petit mot chevaleresque, sa carte de visite montrant son haut grade de qualification. Homme terriblement plein d'argent mais de solitude en mal d'attention, de sensibilité qui tente de faire perdurer des attitudes de gentleman dans ce monde d'indifférents, ou homme marié avec enfants en bas âge qui cherche à s'évader de son quotidien désespérant de platitude...? Le doute reste encore permis. Il n'en reste pas moins que quelque soit le cas, cet homme envoie un signe pour montrer que ce monde va mal. Chacun marche tête baissée dans la grisaille parisienne et s'enferre dans l'étau de l'indifférence. Je croise des centaines de personnes ridées par l'anxiété, l'anxiété des petits tracas de leur quotidien. Chacun promène son angoisse sous son bras, et tente de faire face et illusion tant bien que mal. Cet homme que je n'ai même pas vu, qui m'a observée et qui s'en est allé sans même m'aborder, faisait partie de cette masse de caractères que l'on tend à uniformiser, de cette foule immonde que l'on nomme humanité, et qui se cache toujours un peu plus derrière des apparence désoeuvrantes d'hypocrisie et de mensonge. L'un d'eux s'est dévoilé timidement et voilà qu'on a déjà pu l'accuser de pauvre con plein de pouvoir et d'argent qui veut tirer profit de son statut. Sans vouloir tirer quelconque conclusion hâtive, je ne considère ce geste que comme un acte désespéré, signe de souffrance symptomatique de notre civilisation prétendument élévatrice. Comme l'a prouvé une étude sociologique récente, plus la société crée et comble des désirs, moins l'homme aura la capacité de se sentir heureux. Que cherchons-nous à combler? Un vide existentiel que laisse cette société consumériste et avide de joujous illusionistes. Le Japon en est l'exemple le plus symptomatique. Cette société manique du jouet et du gadget recense le plus fort taux de suicide de nos civilisations...Voilà à quoi mène l'absence de communication. Des grévistes désespérés se sont emparés des rues et se battent pour des idéaux qui ne sont plus d'actualité. Un combat pour une vision du monde, une vision solidaire et belle, avouons-le. Mais l'individualisme crie à "la dictature fasciste de gauche" Jolie contradiction née de la révolte de riches égoistes qui sont allés manifester dans les rues pour crier non a la solidarité... Je vais vous laisser sur ces mots qui découlent de la morosité de ma journée. Comme toute jeune fille formatée, je vais rempiler mon tailleur pantalon demain qui me fait passer pour une femme forte et bien rangée... comme tout le monde... comme ce que veut notre monde. Pour aller une nouvelle fois faire figuration et ne rendre rien d'original...

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